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discerner ce qui nous cerne 23 décembre, 2011 L’oeil dans le pli se referme… Classé dans : Non classé — liage @ 23:15 Fatigué par la publicité intempestive, se referme et vous invite à jeter le vôtre ailleurs : http://sens-accroc.eklablog.com/ Pas de commentaire -- 23 octobre, 2011 6) Jouissez sans entraves Classé dans : DEPLIONS LE SEXE — liage @ 19:32 Mai 68, dernier soubresaut révolutionnaire ou origine de tous nos maux? On connaît la critique de l’injonction à jouir. La recherche de l’épanouissement sexuel serait devenu une prescription sociale, édictant ses normes : l’esthétique du corps athlète et le culte de la performance (que le cinéma porno met en oeuvre.) Nous serions pris dans une nouvelle contrainte de la culture de masse, qui nous condamnerait à parler de sexualité en termes quantitatifs (nombre de fois, de partenaires, nombre d’orgasmes, durée, etc.) Mais quel serait l’intérêt social de cet impératif à jouir? La question est souvent éludée par cette critique. Essayons d’y répondre : _ Etendre l’autorité du discours hygiéniste car jouir sexuellement serait un signe de bonne santé. Il y aurait ainsi une économie intime du rapport sexuel, une diététique individuelle adaptée à trouver. Il s’agirait d’une nouvelle norme sociale, un contrôle accru sur l’expression individuelle de la sexualité quand sa répression ménageait paradoxalement un espace de liberté intime. _ L’intégrer aux signes extérieurs de richesse. Faire de l’accès « au sexe » une carotte de choix dans la course à la réussite sociale n’est pas une nouveauté. Mais il s’agirait aussi de considérer le corps comme un bien (ma propriété) à entretenir, valoriser, à bien placer sur le marché, etc. Savoir jouir de son corps, comme de son patrimoine, faire en sorte qu’il rapporte. Vivrait-on l’ère de la prostitution symbolique généralisée des corps – parce que je le vaux bien ? Mais acheter son image n’est pas vendre son corps. La réalité de la prostitution relève non seulement d’un asservissement sexuel archaïque de la femme par l’homme , mais aussi des formes les plus primaires « d’exploitation de l’homme par l’homme » comme disaient les marxistes du capitalisme. Cette critique, qu’il faudrait qualifier de réactionnaire ou de morale, ne va pas jusque là. Elle repose sur une conception idéaliste du sujet intègre, disposant librement de lui-même, qu’elle partage avec l’utopie libérale qui sacralise la valeur marchande sans limite. Comment! Me dira-t-on. Mais le credo du discours libéral garantit au contraire la plus grande tolérance possible à l’égard de la sexualité. Chacun est libre , dans le domaine privé que défend la démocratie libérale. Que vous soyez hétéro, homo, ou bi, le marché, amoral, vous offre ce que vous demandez : vidéos, objets, accessoires, vêtements, clubs… Cette liberté n’est circonscrite que par le cadre légal qui régit les relations entre adultes consentants et l’argent qui permet de consommer ces produits et ces services. Le capitalisme s’est inventé une nouvelle morale. De fait, la vente de sextoys, d’accessoires et de vêtements « coquins et érotiques », voire « fétichistes » est devenue un commerce comme un autre, et même très lucratif. De boutique glauque pour « frustrés » vulgaires et autres « obsédés », le sex shop s’est métamorphosé en shopping chic de charme et en réseau d’allées immatérielles déroulant des imageries érotiques rose bonbon ou cuir hard, nous promettant le « développement durable du couple » (c’est moi qui souligne) ou simplement des sensations nouvelles. Preuve irréfutable, par le marché, que la libération sexuelle est un acquis social de la démocratie libérale, grâce à son entrée dans le circuit pérenne de la consommation de masse? Traduction économique de l’effacement du tabou sexuel? Le libertin lui-même serait moins libertaire que libéral au sens contemporain, c’est-à-dire qu’il associe liberté individuelle et économique. D’ailleurs, le libertinage contemporain, dans ses formes sociaux-économiques organisées (boites de nuit, clubs de rencontre, campings…) n’opère-t-il pas de fait une sélection par l’argent? La libération qu’il propose repose véritablement sur le repli d’un entre-soi, une clôture socioculturelle. N’y entend-on pas des discours de haine et d’exclusion sous les formes banales du racisme ou du mépris de classe? Que deviennent, dans ces conditions, les attentes suscitées par l’expression libération sexuelle ? N’y entend-on plus que libération de la sexualité, et non plus libération par le sexe, émancipation de l’individu, transformation sociale? Les freudo-marxistes concevaient en effet la libido comme énergie de réserve alimentant le désir de révolution, et comme dénominateur commun du plus grand nombre. Les murs de mai 68 ont affiché l’égalité devant le sexe, comme les danses macabres du Moyen Age représentaient l’égalité devant la mort. « Jouissons sans entrave », ce mot d’ordre d’une révolution culturelle n’était-il qu’un slogan publicitaire en avance sur son temps? Faites-vous plaisir, essayez de nouvelles sensations, reculez les limites de votre jouissance , n’est-ce pas ce à quoi nous invite à chaque instant la société de consommation? En passant de la première personne du pluriel ( nous , qui implique le locuteur) à la deuxième ( vous , qui le fait disparaître derrière l’incitation.) Et si le capitalisme a triomphé du marxisme, n’est-ce pas d’avoir réalisé techniquement cette libération-là? Machines, vêtements, denrées, objets usuels, services… tout est vendu comme résultat d’une technique, d’un concept opératoire. Pourquoi pas le sexe? Pourquoi pas l’amour? Pourquoi pas l’érotisme? Comment demander une augmentation? Comment sauver votre couple? Comment l’épanouir ? Comment faire une sodomie? Un cunnilingus? Êtes-vous prêt(e) pour l’échangisme? Le SM? Les réponses à toutes ces questions sont des modes d’emploi. La pensée opérationnelle que dénonçait Marcuse dans L’homme unidimensionnel a vraiment envahi tous les aspects de notre existence. Le marché de l’érotisme équivaut-il à une démocratisation ou à une massification du libertinage? C’est curieusement la même question que pour l’éducation. Et c’est sans doute une question d’éducation. Et même prioritaire. Evidemment, on ne peut que se réjouir de la facilité d’accès aux informations techniques les plus triviales, aux objets les plus inattendus : l’érotisme est affaire de culture, de pratiques et de savoirs. Dans un reportage sur la sexualité des « jeunes », une jeune femme, assumant la recherche du plaisir avec des partenaires d’un soir, parle en toute liberté, avec naturel . Dans la description « sans tabou » qu’elle fait de ses aventures, elle confie à la caméra qu’elle ne comprend pas tout ce qu’on fait autour de la sodomie, qu’elle trouve désagréable mais à laquelle elle s’adonne car elle sait que c’est attendu de ses partenaires, à qui elle veut « donner le meilleur. » Le meilleur de quoi? Du sexe, d’une représentation codifiée, presque ritualisée, de la relation sexuelle, qui nécessite un sacrifice? Le sacrifice de la femme qui donne le plaisir? Témoignage anecdotique, marginal, extrême? Combien de femmes simulent-elles l’orgasme, pour faire plaisir ? Combien d’hommes restent-ils insatisfaits de ce qu’ils « font au lit »? Combien de couples ne font plus qu’occasionnellement l’amour, n’y cherchant plus grand chose? Vivre dans l’évidence de la jouissance empêche paradoxalement d’en parler. De parler de la sienne, barré de l’image de celle des autres, c’est-à-dire par une représentation de ce qu’elle doit être. Aborde-t-on sans gêne (sans rires triviaux appuyés de circonstances) le sujet de la sexualité entre couples d’amis? Pourquoi est-il plus facile d’en parler seul à seul, avec un(e) ami(e), son psy, un(e) collègue de travail, voire un(e) inconnu(e)? Plutôt que devant celui, ou celle, avec qui on vit sa sexualité? Je ne dis pas qu’on n’en parle pas avec lui ou elle. J’écris qu’on n’en parle pas devant lui ou elle. La pudeur, ou la gêne, réside dans le fait d